Que peuvent faire les observatoires pour accompagner adéquatement les MRC dans l’implantation d’un système de monitorage?

25 juin 2024

Que peuvent faire les observatoires pour accompagner adéquatement les MRC dans l’implantation d’un système de monitorage?

Par Catherine Tremblay, coordonnatrice de l’Observatoire des territoires OTERAUD/UQAC, Alexandre Bégin, agent de recherche à l’Observatoire du développement de l’Outaouais ODO/UQO, Karine Lacasse, coordonnatrice de l’Observatoire des régions centrales ORC/UQTR, Abigaïl Rezelman, coordonnatrice de l’Observatoire des trajectoires territoriales et régionales OTTER/UQAR, Mariella Collini, coordonnatrice de l’Observatoire de l’Abitibi-Témiscamingue OAT/UQAT

Le 10 avril dernier, le Réseau national d’observatoires de l’aménagement et du développement durables des territoires a été invité à participer au congrès annuel de l’Association des aménagistes régionaux du Québec (AARQ) à titre de conférencier. Lors de cette journée, le réseau a proposé plusieurs activités, dont deux ateliers.

Le premier atelier avait pour objectif de dresser un bilan des attentes, des besoins ainsi que des préoccupations des aménagistes à l’égard de la mise en place d’un système de monitorage de l’aménagement du territoire. Le second atelier visait pour sa part à discuter des modes de fonctionnement que pourraient adopter les observatoires pour être utiles aux municipalités régionales de comté (MRC). Le présent article présente les résultats recueillis lors de ces activités.

Mise en contexte : la création du réseau

Le déploiement du Réseau national d’observatoires de l’aménagement et du développement durables des territoires s’arrime avec l’adoption par le gouvernement du Québec de sa Politique nationale de l’architecture et de l’aménagement du territoire intitulée « Mieux habiter et bâtir notre territoire – Vision stratégique ». Cette politique pose la nécessité de moderniser le cadre d’aménagement actuel et, par conséquent, d’adopter de nouvelles orientations gouvernementales en aménagement du territoire (OGAT)[1]. Cette nouvelle mouture de la législation prévoit que les OGAT doivent désormais être assorties d’indicateurs et de cibles convenus avec le milieu et approuvés par le ministère des Affaires municipales et de l’Habitation (MAMH). Afin de faciliter l’atteinte de ces nouveaux objectifs, le gouvernement, par l’entremise du MAMH, a prévu le déploiement d’un réseau d’observatoires à travers le Québec. Adaptée d’un projet conçu par le réseau de l’Université du Québec (UQ), cette initiative est associée à la mission de service aux collectivités des universités.

Le réseau est constitué de cinq observatoires déployés dans cinq universités : l’OTERAUD à l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC), l’ODO à l’Université du Québec en Outaouais (UQO), l’OAT à l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue (UQAT), l’OTTER à l’Université du Québec à Rimouski (UQAR) et l’ORC à l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR). Cette initiative structurante est pilotée par l’UQ[2]. Le réseau dessert les territoires hors des communautés métropolitaines de Montréal et de Québec, ce qui représente environ 90 MRC. Bien que travaillant en réseau dans une optique de mise en commun de l’ensemble des expertises et des connaissances, chaque observatoire couvre un territoire bien défini[3]. Ainsi constitué, le réseau d’observatoires a pour mandat d’accompagner les MRC dans le déploiement d’un système de monitorage en aménagement du territoire.

[1] Gouvernement du Québec (2023), Document de consultation en vue de la publication des nouvelles orientations gouvernementales en aménagement du territoire, Québec.

[2] Université du Québec, (2023) Nos initiatives, Réseau national d’observatoires de l’aménagement et du développement durables des territoires.  https://reseau.uquebec.ca/fr/nos-initiatives/reseau-national-observatoires-amenagement-et-developpement-durables-des-territoires

[3] Dispersion du réseau dans les régions : l’OTERAUD : Capitale-Nationale, Côte-Nord, Saguenay-Lac-Saint-Jean, l’ODO : Laurentides, Montérégie, Outaouais, l’OAT : Abitibi-Témiscamingue l’OTTER : Bas-Saint-Laurent, Chaudière-Appalaches, Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine et l’ORC : Centre-du-Québec, Estrie, Maurice, Lanaudière.

Le déroulement des ateliers

Atelier 1

Le premier atelier s’est déroulé en trois temps, soit la présentation des bons coups et des pièges du monitorage en aménagement du territoire, suivie d’une période d’échange par sous-groupes et d’une mise en commun pour terminer. Deux questions ont été au cœur des discussions :

  • Quelles sont vos attentes et vos préoccupations générales à l’égard du monitorage en aménagement du territoire?
  • Quels sont vos besoins quant à l’intégration d’un système de monitorage au schéma d’aménagement (avant, pendant et après la révision)?

Ce premier atelier a permis de récolter les attentes, les besoins ainsi que les préoccupations des aménagistes présents à l’évènement. Durant l’atelier, les participants étaient invités à inscrire leurs réponses sur un gabarit de prise de notes en format papier.

Atelier 2

L’atelier proposé, de type « sabotage », orientait la discussion autour de deux questions :

  • Que doivent faire les observatoires pour nuire aux MRC en matière d’implantation du système de monitorage?
  • Que peuvent faire les observatoires pour accompagner adéquatement les MRC dans l’implantation du système de monitorage?

Ce type d’activité permet d’explorer collectivement ce qui doit être évité pour ensuite réfléchir aux actions à poser pour éviter le sabotage. Les participants répartis en sous-groupes étaient invités à inscrire leurs réponses sur un support papier avant de les transmettre au reste de la salle par l’entremise de la plateforme en ligne Mentimeter.

Les éléments recueillis

Dans les sections suivantes nous présentons, un regroupement par thématique des éléments qui ont été transmis par les participants (sur les supports papier et numérique) lors des deux ateliers. Les idées ne sont pas présentées en fonction de leur importance relative, mais plutôt de manière à faire ressortir certaines tendances, ainsi que des points de convergence.

Pour accompagner adéquatement les MRC dans l’implantation du système de monitorage, les observatoires devraient :

ÊTRE :

  • Disponibles et accessibles, répondre aux questions dans un délai raisonnable ;
  • À l’écoute des MRC ;
  • Flexibles et ouverts ;
  • Proactifs ;
  • Concrets, pragmatiques ;
  • De bons vulgarisateurs, facilitateurs ;
  • Consultatifs, proposer sans imposer ;
  • Conscients et respectueux des ressources et du temps disponibles dans les MRC ;
  • Neutres et apolitiques, objectifs et indépendants ;
  • Imaginatifs, créatifs et ouverts à l’innovation ;
  • Fonctionnels rapidement ;
  • Pérennes.

COMPRENDRE ET CONNAÎTRE :

  • Les municipalités, les territoires, les régions et les particularités de chacun afin de s’adapter en conséquance ;
  • Les enjeux actuels, en prenant le pouls des MRC et des régions ;
  • Le monde municipal ;
  • Le rythme de travail des aménagistes et des délais qu’ils doivent respecter ;
  • Les différentes facettes de l’aménagement du territoire, dont les besoins en développement ;
  • Le processus de création des schémas ;
  • La géomatique.

POUR TRAVAILLER EFFICACEMENT :

  • Définir clairement les rôles et les attentes de chacun ;
  • Préparer une offre de service claire ;
  • Établir avec les MRC qui le souhaitent un calendrier, plan de travail en fonction des besoins respectifs des MRC ;
  • Adopter une méthode de travail efficace, un rôle de facilitateur ;
  • Travailler en collaboration, en concertation dans une optique de co-construction ;
  • Rencontrer les acteurs territoriaux en faire des suivis personnalisés auprès d’eux ;
  • Ne pas travailler en silo ;
  • Prévoir l’opérationnalisation des indicateurs ;
  • Collaborer, en tant que réseau, avec les CM, l’UMQ, la FQM, les universités hors UQ et les ministères.

POUR COMMUNIQUER EFFICACEMENT :

  • Tirer profit des réseaux de communications existants ;
  • Assurer des fréquents avec les MRC ;
  • Adopter des procédures simples et humaines ;
  • Maintenir des liens étroits et significatifs avec les MRC ;
  • Être dans les CAR-aménagement ou une autre structure existante (ex.: rencontre de zone de l’AARQ) plutôt que de multiplier les comités (sur demande des MRC) ;
  • Inviter les MRC à participer au comité de l’observatoire avec le ministère ;
  • Mobiliser les parties prenantes (élus et citoyens), les sensibiliser et les renseigner sur la démarche ;
  • Mettre en lien, documenter et soutenir des actions concertées intra et interrégionales.

PARTAGER :

  • Une recension des données disponibles en assurant une veille des nouvelles données ;
  • Des méthodologies de création de données assurant une certaine uniformité lorsque des indicateurs sont utilisés dans différents territoires ;
  • Des méthodologies précises et pérennes ;
  • Des bons coups, des bonnes pratiques, des exemples, des connaissances, des références à travers une communauté de pratique, des forums, des portraits, une infolettre ou un bulletin ;
  • Des outils d’aide à la prise de décision ;
  • Des enjeux communs aux MRC de même typologie, un lieu de réseautage ;
  • L’expertise de chaque observatoire, un lieu interobservatoire ;
  • Apporter une réflexion sur le rôle des municipalités dans le système de monitorage.

PROPOSER :

  • Des indicateurs pertinents selon les particularités des MRC et conformes aux besoins exprimés par les MRC, éviter les propositions mur à mur ;
  • Des cibles réalistes ;
  • Des données pertinentes et actualisées (en format FMI). Les recenser, les cartographier, les diffuser et en expliquer les possibilités ;
  • Des idées innovantes (pour des modèles, des données, des méthodes) ;
  • Un accompagnement aux MRC dans la compilation, le traitement, l’analyse et la vulgarisation des données en fonction des besoins manifestés ;
  • Un soutien aux MRC pour mesurer la portée et les limites de leurs indicateurs ;
  • Un accompagnement aux MRC dans la formulation d’objectifs mesurables ;
  • Des indications aux MRC à se projeter, challenger les MRC ;
  • Des expertises variées, notamment en géomatique ;
  • Des formations et des outils de communication pour favoriser la gestion du changement ;
  • Des services équivalents dans chacun des observatoires ;
  • Une personne-ressource par MRC (contact privilégié et dédié) ;
  • D’animer la concertation entre MRC et dans chaque MRC ;
  • Une veille stratégique auprès de tous les ministères.

AUPRÈS DES ÉLUS :

  • Assurer des rencontres pour expliquer le rôle du réseau et le soutien que l’on peut apporter ;
  • Nourrir la réflexion sur la place des municipalités dans le système de monitorage (faire remonter les données vers les MRC) ;
  • Assurer une présence dans les conseils des élus pour les rassurer sur la légitimité de la démarche ;
  • Faire un travail de vulgarisation, de sensibilisation et d’éducation du milieu ;
  • Proposer des outils d’aide à la décision, des scénarios ;
  • Éviter de créer une compétition entre les MRC.

AVEC LE MAMH :

  • Faire une mise au point sur les rôles et responsabilités (MAMH\observatoires\MRC) ;
  • Effectuer un suivi adéquat avec le MAMH pour assurer des pratiques conformes aux attentes ;
  • Rester neutre, ne pas prendre parti pour le MAMH.

Quelques constats

Le partage très généreux des participants lors des ateliers a permis de recueillir plusieurs éléments enrichissants et nourrissants pour les équipes des observatoires.

Nous pouvons présumer que plusieurs des éléments soumis par les participants sont des préoccupations ou des attentes présentes dans la majorité des MRC, notamment en ce qui concerne ce que devraient être les observatoires, les manières de communiquer avec les aménagistes, ainsi qu’en ce qui a trait à l’efficacité et la qualité du travail.

Cela dit, nous sommes également conscients que certains des éléments qui ont été proposés sont souhaités uniquement par certaines MRC. L’organisation d’activités comme des forums ou des activités de concertation entre les MRC ou encore les relations à entretenir avec les élus en sont des exemples.

Ainsi, les équipes des observatoires sont conscientes que les préoccupations et les besoins sont différents d’une région à l’autre, de la même manière que certains éléments qui sont souhaités rapidement par certains, ne seront pertinents pour d’autres que dans un horizon plus lointain. Nous sommes soucieux d’offrir un accompagnement adapté à chacun. C’est pourquoi la mise en commun des préoccupations lors du congrès de l’AARQ est, d’abord et avant tout, une invitation à poursuivre la discussion entre les observatoires et les aménagistes.

Merci pour votre participation lors de ces ateliers et de l’aide apportée dans la construction de votre réseau d’observatoires !

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